« Je crois en l’Esprit Saint,
qui est Seigneur
et qui donne la vie »
Il y a quelques mois, un visiteur inattendu est venu dans mon « lieu de solitude intérieure ». Ce visiteur s’est présenté sous la forme de cette phrase du Credo de Nicée : « Je crois en l’Esprit Saint, qui est Seigneur et qui donne la vie ». L’arrivée inattendue de cette phrase m’a surprise, car elle semblait s’installer dans un espace calme de mon lieu de solitude et de méditation, telle une présence simple, douce et rassurante. Au fil des semaines, elle est devenue une présence constante qui m’attend toujours, me poussant parfois à simplement être avec lui, ou à engager une conversation à cœur ouvert sur ma foi profonde et à laisser le Saint-Esprit influencer ma façon de m’impliquer dans le monde et dans l’Église aujourd’hui.
Plus je m’attardais sur cette phrase du Credo, plus je comprenais pourquoi elle m’était donnée à ce moment précis.
Nous vivons une époque de grand chaos, de grande instabilité politique et sociale, alimentée par une multitude de forces et de motivations contradictoires, amplifiée par l’utilisation des technologies et des media sociaux, ainsi que par les progrès rapides de l’ « intelligence artificielle », qui ont tous un impact majeur sur notre quotidien, nos sociétés et la vie de notre planète. Comme beaucoup de personnes, je suis parfois accablé par la douleur et le sentiment d’impuissance face aux forces de mort et de destruction à l’œuvre dans les nombreuses guerres qui ravagent différentes régions du monde, entraînant d’innombrables déplacements de populations à la recherche désespérée de sécurité et du strict nécessaire à leur survie, et face à l’indifférence apparente et au silence assourdissant des gouvernements face à tant de souffrances. Les récits que nous osons écouter, les images que nous osons regarder — celles de populations civiles, et en particulier d’enfants, bombardés hors de leurs maisons, voire arrachés à leurs lits d’hôpital — sont déchirants. Ces réalités horribles, conjuguées à l’intensification des phénomènes climatiques extrêmes et à leurs effets dévastateurs sur la vie des gens, sont parfois écrasantes. Il m’arrive de vouloir détourner le regard, d’éteindre, de me déconnecter, de faire semblant que tout cela n’existe pas… mais cela existe bel et bien ! Et je sais que si je veux être un disciple de Jésus-Christ, je dois laisser mon cœur être touché par ces réalités. Ne pas le faire me mènerait à devenir insensible et sans cœur. Dans son encyclique Dilexit Nos, le pape François a exprimé avec force les dangers de se détourner :
« L’anti-cœur est une société de plus en plus dominée par le narcissisme et l’autoréférence. Nous arrivons finalement à la “perte du désir”, parce que l’autre disparaît de l’horizon et nous nous enfermons dans notre égoïsme, incapables de relations saines. En conséquence, nous devenons incapables d’accueillir Dieu. » (§17)
Ainsi, je suis profondément reconnaissante à mon « visiteur » qui m’aide à regarder et à voir avec un regard nouveau, à écouter et entendre avec des oreilles nouvelles la réalité plus grande de la Vie présente au milieu de nous — une Présence vers laquelle je peux me tourner encore et encore pour dire : Oui, « je crois en l’Esprit Saint, qui est Seigneur et qui donne la vie ». Alors, au lieu d’être submergée et tentée de me déconnecter de la souffrance de mes frères et sœurs, et de celle de la planète, je suis appelée à les porter devant le « Seigneur… qui donne la vie » ; à Lui présenter la douleur des victimes de la guerre, de la pauvreté et des injustices, ainsi que ma propre douleur, mon impuissance et mon indignation face aux injustices envers les plus vulnérables et à Lui demander : Que puis-je faire de plus ?
J’en suis venue à réaliser que cette phrase du Credo de Nicée est une autre facette de cette expression remplie de l’Esprit tirée de nos Constitutions, qui m’a soutenue, inspirée, interpellée et accompagnée pendant de nombreuses années :
« Nous croyons à la présence transformante de l’Esprit Saint dans le monde. Il est à l’œuvre en nous comme en tout homme pour promouvoir le renouvellement spirituel sans lequel la justice et la paix ne pourront s’instaurer » (#12).
Aujourd’hui, la combinaison de ces deux citations m’invite à croire à nouveau en la Présence de l’Esprit de Dieu, créateur et transformateur, qui insuffle une vie nouvelle dans le chaos de notre temps, et en particulier dans le Peuple de Dieu, l’Église.
En effet, je vois désormais plus clairement comment ces citations me permettent d’approfondir aussi ma compréhension de notre mission du Cénacle ici à Brixton, Londres. Notre communauté est « envoyée en mission pour devenir une présence transformatrice au cœur de cette ville ». Je comprends de plus en plus que « devenir » une présence transformatrice exige un cœur ouvert, à l’écoute, compatissant — un cœur présent à la vie quotidienne des personnes et des événements, qui n’a pas peur d’entrer en dialogue avec tous, ni d’habiter ces lieux et espaces liminaires, à la frontière du mourir et du naître, en ces temps de transition, ces temps pascals. « Devenir » évoque ce mouvement constant, nécessaire, vers une transformation continue, cet appel à « se retourner »… à « jeter le filet de l’autre côté »… à chercher et discerner, avec d’autres, la voix du « Seigneur… qui donne la vie » qui m’invite/nous invite à Le suivre… toujours à chercher le ‘Plus’ ! La dynamique du « devenir » ouvre mes yeux et mes oreilles pour reconnaître et être touchée par la beauté et la bonté de tous ceux qui cherchent des moyens d’alléger le fardeau de ceux qui souffrent, de ceux qui cherchent un sens, et avec eux, de s’efforcer de bâtir une communauté pleine d’espérance attentionnée et compatissante dans notre quartier et au-delà.
Alors, je rends grâce pour mon « visiteur » qui, au cœur de ce temps pascal, a ravivé ma foi et m’a permis de proclamer librement :
Oui !
Je crois en Dieu,
En Jésus Christ
et en l’Esprit Saint,
qui est Seigneur et qui donne la vie,
et qui procède du Père et du Fils
Sr Patricia Byrne
Communauté de Brixton, Londres
19 mai 2025